Charles Rodrigues, « The Story of a Man and His dead Friend. »

Vient de paraître aux éditions Fantagraphics « Ray and Joe: The Story Of A Man And His Dead Friend And Other Classic Comics » de Charles Rodrigues, cartoonist fameux du National lampoon, de Stereo Review ou de Cracked Magazine, et décédé en 2004. On connaît mal Rodrigues en france, c’est peu de le dire ! Pas énormément d’infos sur le web non plus, mais quand même quelques images réjouissantes.
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En tout cas, est paru en 1992 un recueil chez Glénat, « Les handicapés font rire comme les autres » que j’avais acheté à l’époque ; dessins absolument hilarants sur les handicapés, les morts, les toilettes, l’amour mécanique (!!), les amputés, sujets rarement traités par les dessinateurs de presse, spécialement anglo-saxons, mais qui sont la spécialité de M. Rodrigues. Son trait est identifiable au premier coup d’œil, et on sent des influences diverses, mais vite digérées ; Rodrigues pourrait être le croisement d’un Searle et d’un Quino, avec la férocité d’un Reiser.
Les handicapés font rire comme les autres. Editions Glénat, 1992.
Mais venons-en au sujet de ce post : le livre paru chez Fantagraphics (une compilation de planches de bandes dessinées issues du National Lampoon) C’est un monument d’humour noir, et on se délecte des aventures de Ray et son ami Joe, décédé, qu’il ne se résigne pas à enterrer, et qu’il trimballe partout. S’y ajoutent les histoires de Deirdre Callahan, petite fille tellement laide que sa seule vue pousse au suicide quiconque la regarde, les histoires hilarantes des frères siamois Aesop et de leur quotidien drôlissime, Sam de Groot, détective privé emprisonné dans son poumon d’acier, et pas mal d’autres historiettes réjouissantes. Il faut dire que Rodrigues avait carte blanche pour ses histoires, et on sent sa jubilation à chaque case.
C’est très, très, très drôle ! Quel éditeur français est déjà sur les rangs pour traduire ce chef d’œuvre ?
rodrigues-book-01Ci-dessous, les 5 premières pages :
Un extrait de la préface du livre, signée Bob Fingerman, dessinateur américain, traduite par mes soins :

À un œil non averti, les dessins de Charles Rodrigues peuvent sembler remplis de ratures, de traits d’encre nerveux, bref ressembler à des pattes de mouches. Il est clair que tout un chacun aurait du mal à reconnaitre dans le travail de Charles Rodrigues le perfectionniste méticuleux qu’il était réellement. Mais la profession ne s’y est jamais trompée et a toujours admiré son travail avec une crainte respectueuse. La perfection dans ses mises en scène, l’expressivité de ses « acteurs », ses architectures ou ses perspectives forcent l’admiration. Plus d’une fois j’ai entendu son travail taxé de pas très sophistiqué. Je ne suis pas d’accord. Sa ligne est épaisse certes, elle tranche dans la fibre même du papier, mais le trait est contrôlé et absolument délibéré. On y reconnaît un pur artisan, en pleine possession de son art. Mais la spontanéité de son travail n’est qu’un leurre. En fait Rodrigues détestait dessiner des bandes dessinées, c’était pour lui une corvée longue et laborieuse. Il commençait son travail en milieu d’après-midi et le terminait souvent bien après l’aube, c’était un acharné, rivé à sa table de travail (bien qu’il aurait été probablement irrité qu’on le définisse ainsi). Il a décrit sa méthode de travail au collectionneur d’art Joseph Caruso :« Comment je travaille ? Eh bien, je crois qu’il n’y a pas 2 dessinateurs qui travaillent de la même façon. Ceci dit ça se vérifie aussi pour les écrivains, les compositeurs ou les poètes. Je dessine sur une table lumineuse (pour dire vrai c’est juste une plaque de verre posée sur un morceau de bois que j’ai trouvé sur la plage un jour). Je n’utilise pas de crayon, je dessine à la plume et à l’encre. Je commence évidemment par un croquis approximatif de la scène que je dois dessiner. Après cette première esquisse, je retourne le croquis sur le verso et je pose une nouvelle feuille de papier dessus, et j’améliore le dessin et la composition. Je continue à faire cela jusqu’à ce que je sois satisfait de mon travail. Je peux utiliser 3, 4 ou 5 feuilles, jusqu’à ce que j’obtienne ce que je veux et il peut y avoir 8 à 10 étapes. Mais je retourne toujours la feuille précédente pour que le dessin soit en miroir. J’ai appris il y a longtemps qu’en regardant un dessin par l’arrière à travers une lumière, cela vous montre vos erreurs, en particulier dans les perspectives et la composition. Quand je suis satisfait, alors seulement je trace le dessin définitif sur un papier de meilleure qualité pour finir mon dessin. »

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LIENS

On trouve toutes les infos sur ce livre sur le site de Fantagraphics.

Une vidéo preview du livre

Une galerie de dessins d’humour de Charles Rodrigues de 1964

Une galerie de dessins d’humour de Charles Rodrigues de 1966